mercredi 15 avril 2015

Prise de conscience d'un jeune kabyle : par Mohamed Benarous

PRISE DE CONSCIENCE D'UN JEUNE KABYLE : PAR MOHAMED BENAROUS

15/04/2015 - 09:40


CONTRIBUTION (SIWEL) — L’honneur n’a pas de prix, quand beaucoup le vendent, quelques-uns, dans leur coin, le manifestent et s’organisent. Dans l’hécatombe du printemps de 2001, naquit un mouvement, tout d’abord autonomiste puis auto-déterministe. L’homme qui prit la décision de libérer son peuple avec ses compagnons ne pouvait être que celui qui s’opposa avec sa guitare et ses chansons à l’Algérie coloniale. Je parle bien sûr de Ferhat Mehenni.


Prise de conscience d'un jeune kabyle : par Mohamed Benarous
Je ne saurai jamais remercier l’Homme qui a su me faire comprendre que je n’étais pas celui qu’ils voulaient que je sois. Formaté à l’idée d’être un Algérien dès la naissance, j’ai cru dur comme fer que j’étais l’héritier d’un peuple de guerriers ayant repoussé de l’autre côté de la méditerranée les Français. Que fut ma surprise à l’âge de mes premiers mots d’entendre dans l’hymne national Algérien un hommage implicite en l’honneur de l’ancien occupant. Je crois, après moult écoutes, que ce texte rend gloire à la France impériale et aux félons des frontières. J’ai ainsi compris que le respect que l’Algérie a envers la France est uniquement le fait d’être né grâce à sa plume. 
Sa plume, quand certains naissent sous l’écrit du général Schneider et s’émancipent sur l’unique décision du général De Gaule, d’autres l’utilisent à bon escient, à des fins intellectuelles, philosophique et politiques. 

Que fut ma surprise quand j’étais jeune enfant voulant communiquer avec des Algériens autres que ceux de mon comté. Ils parlaient une langue étrangère à la mienne, une langue étrange avec des sons glauques. Je ne comprenais rien, j’étais chez moi, mais je devais m’exprimer avec des mots qui sont les leurs. 

À l’école, j’avais compris qu’il faille apprendre cette langue venue d’ailleurs, une langue imposée sur la terre de mes ancêtres, une langue qui ne sert qu’à communiquer avec les autres algériens. 
Au fil du temps, j’ai eu tout de même l’audace de questionner certains hommes politiques de mon pays sur le fait que je devais apprendre une langue étrangère mais que ces étrangers ne voulaient absolument pas apprendre la mienne. J’ai eu une réponse très limpide : nous sommes tous des algériens et des arabes. 
À partir de là, j’ai compris, malgré mon très jeune âge, que j’étais un étranger dans mon propre pays. C’est ainsi que débuta ma quête du savoir, de mon histoire, et de celle de mon peuple. 

Au moment où je commençais à fouiller dans le passé, je n’étais pas très connecté à la réalité de la vie. Je voyais Ait Menguelet applaudir Bouteflika à Tizi-ouzou, Saïd Sadi pactiser avec le « président de la république » après avoir boycotté la dernière fraude du siècle, … puis vint l’apocalypse du printemps 2001. 
J’ai pu voir les innombrables lâches de mon pays servir ceux qui m’imposaient de parler leur langue et être comme eux. Quand je me suis rappelé que jadis mon père me parlait de Matoub Lounès et de Ferhat Mehenni, je m’y suis intéressé et j’ai creusé. 

Je savais, comme tous les kabyles, que Matoub Lounès s’est fait assassiné avec la complicité de Kabyle De Service, mais je ne m’étais jamais attardé sur ses chansons. Quelle grande surprise quand j’ai eu la joie de comprendre ses pensées profondes et l’ampleur et la profondeur de ses œuvres. J’ai donc compris les raisons du complot, et du pacte silencieux de tous ceux qui ont participé à sa mort. 
J’avais parallèlement écouté les chansons que me conseillait mon papa. Il me raconta qu’à l’époque de Boumediene, les écrits étaient assassins, les mots étaient plus touchant qu’une balle, que Ferhat fusillait oralement quand d’autres éliminaient physiquement. Ferhat Mehenni était en quelques sortes le Che Guevara de la chanson et du militantisme kabyles. 

C’est ainsi que j’ai saisi, l’intérêt abyssal des chanteurs engagés et des risques qu’ils prenaient, tout en gardant en mémoire qu’il est plus facile de tuer une personne que de détruire ses idées. Il y a malheureusement des fourbes parmi ces chanteurs engagés, des personnes qui mangent à tous les râteliers, des gens qui se disent fiers d’être des algériens, qui sont d’origine kabyle, mais qui vivent depuis tant d’année à l’étranger. Personnellement, je pense que ces gens là doivent absolument être boycottés, ils sont très nuisibles et portent préjudice à notre cause et notre identité. 

L’honneur n’a pas de prix, quand beaucoup le vendent, quelques-uns, dans leur coin, le manifestent et s’organisent. Dans l’hécatombe du printemps de 2001, naquit un mouvement, tout d’abord autonomiste puis auto-déterministe. L’homme qui prit la décision de libérer son peuple avec ses compagnons ne pouvait être que celui qui s’opposa avec sa guitare et ses chansons à l’Algérie coloniale. Je parle bien sûr de Ferhat Mehenni. 

Comme pour toute révolution, ils étaient qu’une poignée à y croire, petit à petit, le mouvement a pris de plus en plus d’envergure jusqu’au point d’être la premier force politique en Kabylie, sans accréditation et sans élus. 

Certains plaisantins ont parlé que le leader du mouvement, avant 2011, était à la solde d’une puissance étrangère pour détruire l’Algérie et pour diviser les algériens, une accusation chère à tous les régimes totalitaires du monde. Mais ce qu’ils n’ont pas compris, c’est que Ferhat Mehenni voulait sauver la Kabylie. À bon entendeur, celui qui parle de division ne peut que se considérer comme algérien, car on ne se sépare que de ce que l’on n’est pas mais jamais de ce que nous sommes. 

Je me suis intéressé au mouvement quelques mois après sa création, en effet j’étais devenu très méfiant de ce qu’il émane du kabyle, car les arrivistes et les opportunistes ont remplacé les Hommes d’honneur et de courage. Mon doute s’est dissipé quand j’ai eu l’occasion de dialoguer avec les représentants et la sincérité de beaucoup d’adhérent, je me suis dit enfin, des gens parmi les miens ont décidé de prendre notre destin en main. 
J’ai été choqué d’apprendre que les assassins du fils de notre leader, Ferhat Mehenni, sont encore en liberté. Et je ne suis pas étonné du silence des français qui refusent de faire la lumière sur l’assassinat d’Ali André Mécili qui reste encore secret d’état. Parait-il que l’assassin de ce dernier s’était fait arrêter, puis relâché car sur lui, il avait un ordre de mission de la sécurité militaire algérienne. Il est aussi très difficile d’ admettre que, le meurtre du fils de Ferhat Mehenni n’est pas autre que politique et n’est en aucun cas un crime de droit commun, comme le prétend encore la justice française. Nous saurons la vérité quand notre État, l’État Kabyle, sera instauré dans une Kabylie indépendante. 

Je ne lorgne pas d’éloge sur Ferhat, qui a pu être abattu, car perdre un enfant, la chaire de sa chaire, ne peut être que souffrance, et plaie jamais cicatrisée, mais il a su garder la tête haute, et nous montrer le droit chemin. Il a perdu son fils, mais il a gagné tout le respect pour son combat et sa détermination. J’ai tellement d’estime que j’ai hâte de le revoir en Kabylie, sous l’hymne kabyle et lever notre drapeau. 

En effet, depuis 2011 et l’avènement du Gouvernement Provisoire Kabyle (GPK) en 2010, un virage important a fait paniquer Alger et ses supplétifs, l’internationalisation du combat kabyle pour la libération de la Kabylie. D’une part, la gestion du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie, devenu Mouvement pour l’Autodétermination (MAK) de la Kabylie en 2013 et d’autre part le GPK sont habillement et intellectuellement très bien dirigés par Bouaziz Ait Chebib, et Ferhat Mehenni sans oublier toutes leurs équipes respectives. 

Je sais que beaucoup racontent que Ferhat vit à Paris, mais ils ne font que répéter les histoires de comptoir et de cabaret. Ferhat est exilé à Paris, il n’a pas le droit de voyager ou de quitter ce pays, car lors d’une sortie officielle, le premier pays où il a posé les pieds était la France, et cette France accueille tous les exilés, tout comme elle a fait avec l'ayatollah Khomeini ou Léon Trotski. Je n’irai pas plus loin, sur ce sujet, mais il est très dur pour un Kabyle de vivre loin de sa terre. Ferhat souhaite bien plus que tout de vivre dans son propre pays, la Kabylie, parmi les siens et sans être sous l’occupation Algérienne. Par contre, je dis à tous ces algériens de balayer devant leur porte avant de vouloir s’occuper de celles des autres. Quel que soit le parti politique ou responsable algérien, ils sont pour la forte majorité, des français et arrivent encore aujourd’hui à vous prendre pour des imbéciles et des débiles, alors continuer à jacasser sur la Kabylie, Ferhat Mehenni ou Baouaziz Ait Chebib. 

Le GPK, pour ne pas prendre de retard sur l’avènement de l’État kabyle, a mis en avant un état civil officiel. Certes, ces documents ne sont pour l’instant pas reconnus internationalement mais cela est une question de temps. Des pourparlers sont en cours avec des nations pour introduire la question kabyle dans l’agenda des nations unis. Ceci étant, nos documents sont officiels pour tout kabyle et toute la Kabylie. N’hésitez pas à demander votre carte d’identité et votre extrait d’acte de naissance en langue Kabyle. 

Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous le pont, et la Kabylie s’est, une nouvelle fois, affirmée comme laïque le 3 août 2013, lorsque l’oppresseur algérien, a essayé de soumettre tout un peuple a son diktat et son idéologie. Le colonisé s’est levé pour témoigner qu’il n’était pas berné, comme tous ces Kabyles De Service, et s’est levé pour démontrer qu’il était présent, debout, uni et que notre libération, malgré tous leurs supplices, était très proche. 

De jour en jour, nous voyons les graines germer, celles que Ferhat Mehenni a semées. Ils étaient pour la plupart bébé en 2001, aujourd’hui âgés d’environs d’une quinzaine d’années, ils sont dévoués à la Kabylie. L’endoctrinement d’être des algériens n’a pas fonctionné et a échoué. La Kabylie ne peut que se décoloniser du fait d’ajouter à cette semence, des anciens algériens, qui, tout à leurs honneur, ont tout compris, et sont redevenus kabyles. 

Aujourd’hui, le peuple Kabyle est digne, il a retrouvé toute sa splendeur et grandeur, du moins tout kabyle se revendiquant kabyle, car pour les autres, ils ne resteront ce qu’ils sont des algériens. 
Nous sommes fiers, car par la dureté du combat et les scélérats, nous avons réussi à imposer notre idée de se décoloniser pacifiquement, et à créer un hymne et un drapeau kabyles. 

Ce drapeau, jaillira dans toute la Kabylie après avoir officiellement été levé tantôt par le MAK en Kabylie et tantôt par le GPK en exil. Je suis impatient de le voir flotter à la face de ceux qui nous ont tant réprimés par le passé et de ceux qui nous ont tant niés. La Kabylie vaincra, l’Algérie s’agenouillera. 
LA France hypocrite finira par reconnaître la Kabylie et fera jouer l’hymne Kabyle et fera flotter le drapeau Kabyle comme si rien ne s’était passé. 

Il ne faut surtout pas oublier que cette France est le frein, pour l’instant, à notre liberté, elle utilise aussi son propre politique pour nous dénaturer. En plus de considérer les Kabyles de France comme algériens, musulmans et arabes, elle s’appuie sur ses médias propagandistes. Il n’y a qu’à voir le reportage de Thalassa, diriger par Alger et avec l’aval des français pour démontrer que la Kabylie est arabe en montrant Bejaia « arabophone » et en outre sale. Après plus de 158 ans de colonialisme français puis algérien, la France occulte encore l’histoire de ma nation. 

J’ai toujours cru que l’Algérie a été libérée du joug colonial, grâce au courage des maquisards, et que les algériens sont un peuple de guerrier. C’est ce que l’Algérie enseigne à l’école appuyé par des historiens des deux rives qui complètent la négation de l’histoire. Je reconnais que sans réflexion, on y croit, mais en épluchant notre passé, j’ai vu que nous étions en rien des Algériens, que ce peuple, Algérien n’était en aucun cas guerrier mais qu’opportuniste. Car ce sont les kabyles qui ont libéré l’Algérie qui nous occupe aujourd’hui. 

J’ai appris par les chansons et les textes que nous étions des descendants d’une ancienne civilisation unie sur Tamazgha mais qu’aujourd’hui le temps a fait de nous une multitude de peuples cousins mais très différents. Je ne me revendique donc pas Chawi, Targui ou Mozabite, mais uniquement Kabyle. 
Kabyle par ces héros de 1857 qui n’ont jamais voulu se soumettre, contrairement aux autres ethnies au colonialisme français. Kabyle, par ces héros de 1871 qui se sont levés et se sont faits trahir par ceux de l’ouest. Kabyle par ceux qui donnèrent naissance au premier mouvement national pour la libération du nord de l’Afrique. Kabyle par ces milliers d’enfants ayant donnés leur vie pour que naisse un nouveau pays. 
Trahi par les siens, des Kabyles De Service de l’époque, le Kabyle qui donna sa vie contre l’occupant français a vu donné naissance à un nouveau pays nommé Algérien qui n’est en rien le sien. 

L’histoire nous a montré que même parmi les nôtres, des renégats seront toujours contre nous dans la mesure où leurs intérêts personnels sont remis en question. Il ne faudra jamais oublier que Ferhat Mehenni aurait pu être ministre de la république algérienne, mais il a toujours refusé d’ être un suppôt d’Alger tout en préservant son honneur et sa noblesse. Rare sont les hommes comme lui aujourd’hui, du docteur moustache, ou nonagénaire, que des algériansites se cachant derrière une kabylité mal assumée. 

Bernés par ces Algériens, qui ne cherchent qu’à nous arabiser, les Kabyles De Services sont les maladies qui les font progresser. Chacun d’eux y va de tout cœur et de son idée, que cela se passe en Kabylie, en Algérie ou en France, ces lâches cherchent toujours faire plaisir à Alger. Il suffit de voir lors de l’inauguration de la place Sliman Azem à Paris, qu’uniquement les Algerianistes étaient invités. En aucun cas, Ferhat Mehenni, exilé tout comme Sliman Azem y a été convié. Pourtant, les deux hommes ont le même destin, celui d’être occultés par Alger. En fait, me semble-t-il, les initiateurs de cette inauguration n’étaient que les associés ou proche du régime algérien, comme quoi, ils ont aussi tissés des liens en France pour s’imposer. 

Née sous la déclaration de l’ex colonisateur, l’Algérie a vu que sa colonie, la Kabylie, s’émanciper sous la plume de Ferhat Mehenni et de son gouvernement en exil. Jalousie ou mal compris beaucoup de Kabyles, qui dans un sens ne se reconnaissent pas Algériens et dans l’autre raillent tout ce qui dessert la cause Kabyle par ignorance et inconscience. Pourtant, il leur suffit d’ouvrir les yeux et de suivre le Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie pour enfin se réconcilier avec eux-mêmes. S’ils préfèrent le statu quo, cela sert Alger, s’ils servent Alger, tant mieux pour eux s’ils se prennent pour des algériens, mais moi, après avoir étudié et fait des recherches je ne peux que suivre celui qui nous a montré le bon et droit chemin pour notre liberté. 

Je n’ai rien en commun avec ces algériens, que cela soit sur l’aspect cultuel ou même intellectuel, nous n’avons absolument aucun intérêt conjoint. Le leur est de nous arabiser et de nous coloniser, le mien est de nous dés-arabiser et de nous décoloniser. Deux choses aux antipodes, je ne peux être schizophrène. 

Enfin de compte, la France a créée l’Algérie, et les personnes sans origines ayant pris le pouvoir ont fabriqué un nouveau peuple, le peuple algérien, à leur image. Nous, nous avons la chance d’être nés Kabyles, avec une histoire millénaire, des coutumes, des traditions qui ont fait de nous un peuple solidaire et révolutionnaire. De tout temps, tous ceux qui ont essayé de nous soumettre ou de nous faire disparaître on subi de grave perte et se sont confronté à un « Homme » qui a pris le destin de son peuple en main. Hier c’était Massinissa, Kahina, Akcel, El Mokrani, El hadad, … Aujourd’hui c’est Ferhat Mehenni. 

Un kabyle est à l’Algérie se que l’huile est à l’eau, tant qu’il y a une instabilité, tout se mélange, mais quand le calme reviendra, nous nous séparerons. 

Nous sommes unis, nous sommes uniques, nous sommes Kabyles. 

Mohamed Benarous 

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