samedi 14 janvier 2012

FIS : Le «retour»… sur facebook - Dossier - El Watan

FIS : Le «retour»… sur facebook - Dossier - El Watan

La grande tentation du parti dissout

FIS : Le «retour»… sur facebook

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le 22.12.11 | 01h00 6 réactions

Si la nouvelle loi sur les partis politiques semble scellée «définitivement» l’interdiction du retour des anciens dirigeants du FIS, elle ouvre néanmoins une brèche à une autre catégorie d’islamistes, les «anciens» de l’Armée islamique du salut en l’occurrence.

Vendredi 11 décembre. Mosquée Al Wafa Bi Alaâhd «fidélité au sermon». Entouré d’une poignée de fidèles, de flics et de curieux, l’indécrottable n°2 du FIS, Ali Benhadj, plus offensif que jamais, déverse sa colère dans l’enceinte même de la mythique mosquée du «front». Sa cible ? Les moukhabarate, les «services» algériens, concepteurs, selon lui, de la nouvelle loi sur les partis, qui barre la route (lire article 4) aux anciens dirigeants du FIS et les prive de toute perspective de retour sur la scène politique. «Personne dans ce pays, jure-t-il, ne pourra nous empêcher d’exercer nos droits politiques à moins qu’on nous coupe la tête.»
Deux jours avant, le mardi 6 décembre, Benhadj observera, seul, une pancarte à la main, un sit-in devant le siège du Parlement pour protester contre une loi dénoncée, très timidement par le personnel politique de l’opposition. Embarqué par la police, Ali Benhadj sera relâché quelques heures après. L’enfant terrible de la mouvance islamiste radicale n’a pas cessé, depuis sa libération en mars 2006 de la prison militaire de Blida, de «faire» tapageusement de la politique, tombant, souvent en invité-surprise dans les forums et manifestations publics et produisant des prêches politiques au vitriol dans les mosquées des quartiers populaires. De l’envergure, Ali Benhadj veut de nouveau en prendre, il met en place une «cellule de communication», très active sur internet et les réseaux sociaux. Même dissous par décision administrative au lendemain de l’insurrection islamiste en 1992, le FIS s’offre une «seconde vie».
Sur le web. Des comptes facebook, Twitter, YouTube… ont été ouverts au nom du Front islamique du salut. L’autorisation légale ? Le cheikh s’en passera. Et ce ne sont ni ses interpellations répétées ni les poursuites judiciaires qui le dissuadent de reprendre du service actif. «Nous ne quémandons pas d’autorisation (pour exercer la politique) et les despotes n’en délivrent pas», prêchait-il ce vendredi 11.
«Le pharaon d’Egypte a-t-il autorisé le prophète Moïse à accomplir sa mission divine, s’interroge-t-il. Le Prophète Mohamed a-t-il été autorisé par Aba Jahel pour répandre la foi musulmane ? Les manifestants du 11 Décembre 1960 (Alger) ont-ils demandé une autorisation à l’administration coloniale pour sortir dans la rue ?» Aux côtés d’un Ali Benhadj, d’autres dirigeants du FIS reviennent au-devant de la scène.
Anouar Heddam, El Hachemi Sahnouni, Abassi Madani, etc., frétillent eux aussi d’impatience à l’idée de devenir un jour «très» proche, «calife à la place du calife». L’approche des élections aiguise les appétits politiques, réveille de vieilles ambitions.
Le 8 décembre. Deux ex-responsables du parti dissous (FIS), El Hachemi Sahnouni et Abderezak Zeraoui, apparentés aux «services», pondent un communiqué dans lequel ils dénoncent le verrouillage du champ politique et l’interdiction faite aux «ténors» du FIS de revenir sur scène politique. Sahnouni, prédicateur salafiste, idéologue du groupe d’Al Hidjra ou Takfir, s’illustre régulièrement par ses fatwas incendiaires et appels répétés à décréter l’amnistie générale aux terroristes. Le 6 décembre, de Doha, la capitale du Qatar, c’est le leader de l’ex-FIS en personne qui sort de son hibernation. Abassi Madani annonçait par communiqué son intention de «contester auprès d’institutions internationales les dispositions de la nouvelle loi sur les partis estimant que cette dernière violait les conventions internationales sur les droits politiques et civils». Le 28 novembre, du lointain Burkina Faso, où il a été exilé par la France (!), Ahmed Simozrag, militant et avocat du FIS, interpelle, par lettre, le ministre de l’Intérieur, Daho Ould Kablia : «Vous venez de commettre une injustice inqualifiable !», lui signifie-t-il suite à l’adoption de la loi sur les partis. «Non seulement votre décision est anticonstitutionnelle, elle est surtout contraire aux intérêts de la nation. L’histoire retiendra que vous êtes le ministre qui a blâmé le peuple algérien en le privant de ses droits civils et politiques», ajoute Simozrag.

Mezrag et le parti des «repentis»

Le 21 septembre, de Washington, l’ancien dirigeant de l’ex-FIS, Anouar Haddam, tombait à bras raccourcis sur les «janviéristes», collège d’officiers supérieurs et de responsables politiques ayant endossé l’interruption du processus électorale le 12 janvier 1992. D’après des indiscrétions, l’ancien président de la délégation du parti dissous, en exil aux Etats-Unis depuis 1992 et fondateur depuis peu du Mouvement pour la liberté et la justice sociale «négocierait» toujours avec l’entourage du président Bouteflika en vue d’un éventuel retour en Algérie. Anouar Heddam, qui incarne l’aile américaine du FIS, plaide pour un changement politique «pacifique et consensuel» et propose la création «d’un conseil national» chargé d’organiser un «débat ouvert et élargi, pour un changement pacifique du système politique». Si la nouvelle loi sur les partis politiques semble scellée «définitivement» l’interdiction du retour des anciens dirigeants du FIS, elle ouvre néanmoins une brèche à une autre catégorie d’islamistes, les «anciens» de l’Armée islamique du salut en l’occurrence. L’article 4 interdit à «toute personne responsable de l’exploitation de la religion ayant conduit à la tragédie nationale de fonder un parti, de prendre part à sa fondation ou de faire partie de ses organes dirigeants». La même interdiction est signifiée aussi à «quiconque ayant participé à des actions terroristes et qui refuse de reconnaître sa responsabilité pour sa participation». Cette dernière catégorie, tente d’expliquer Daho Ould Kablia, le ministre de l’Intérieur, soit «ceux qui ont commandité des actes ayant mené à la tragédie nationale, au même titre que ceux ayant commis des crimes et les repentis qui ont des choses à se reprocher ne peut pas créer de partis, mais si elle veut adhérer à une formation politique, la question sera examinée au cas».
D’après le député Ali Brahimi, l’article 4 semble avoir été conçu «sur mesure» pour des gens comme Madani Mezrag. 15 ans après sa reddition négociée, l’ancien chef sanguinaire de l’armée islamique du salut - dissoute en 2000 après une trêve signée avec l’armée en 1997, suivie d’un accord d’amnistie – commence à trouver le temps long. L’ancien seigneur de la guerre trépigne d’impatience à la perspective de reprendre les maquis de la politique et ambitionne de lever plus qu’une armée de militants parmi les 15 000 terroristes «repentis». Mezrag veut aller vers un «congrès» fédérateur de la mouvance de l’ex-FIS. «Ce jour-là, dit-il, ni Zerhouni, ni Bouteflika, ni Toufik ne pourront nous empêcher de faire de la politique, car celle-ci c’est le peuple qui l’aura imposée par ses luttes». «Le FIS demeure plus que jamais, selon lui, un interlocuteur incontournable : il a été partie prenante dans la crise, car piégé par le régime, le FIS est aujourd’hui indispensable pour la mise en place d’une solution de sortie de crise.» Les «vétérans» de l’AIS, qui ont bénéficié, d’après Mezrag, de «mesures spéciales» de la part du président de la République et gardent «intacts et entiers leurs droits civiques et politiques» bénéficieront-ils de l’article 4 de la nouvelle loi ?
Mezrag affirme n’avoir jamais «quémandé» quoi que ce soit chez Ould Kablia. «Pour l’instant, nous nous montrons patients. Nous leur donnons encore du temps, mais il m’apparaît, d’après les déclarations des responsables et la démarche de l’Etat, que le pouvoir ne veut pas d’une véritable réforme, qu’il nous rit à la barbe et qu’il ne veut négocier qu’avec lui-même et avec ses soutiens et que lobby sioniste au pouvoir pousse à l’intervention de l’OTAN.» Après une tentative ratée de participer aux législatives de 1997, le «concordiste» Madani Mezrag veut se relancer, en perspective des prochains scrutins, se disant «convaincu de la victoire du courant islamiste». «Mais bien sûr que nous voulons y prendre part. Mais pas avant que l’Etat n’aille vers de véritables réformes, ajoute-t-il. Ces réformes doivent être la résultante d’un consensus entre tous les courants représentatifs de la société algérienne et doivent déboucher sur la signature d’une charte nationale d’honneur dans laquelle seront débattues avec sérénité toutes les questions en rapport à la place de la religion, à l’identité nationale, à la nature de l’Etat, à l’histoire.»


Mohand Aziri

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