Algérie: A quoi tiennent les révélations sporadiques sur la corruption.
Encore des révélations sur la corruption des milieux dirigeants en Algérie. C'est un exercice désormais éprouvé, que les clans du régime, mettent en branle pour se dissuader, les uns les autres, d'empiéter sur de nouveaux territoires de chasse. La méthode est toujours la même, tirer à blanc. C'est à dire faire beaucoup de bruit, et pas de dégâts conséquents. Au besoin user de lampistes. La règle la plus fondamentale de ces échanges d'amabilité consiste en un véritable tabou. Ne jamais attaquer, sur ces thèmes de la corruption, un membre du premier cercle. Là où la corruption est réellement immense, où les commissions sur les achats d'armement et d'équipements militaires avoisinent les 20% de l'ardoise, où les barons puisent directement dans les mécanismes financiers de vente des hydrocarbures, où ils sont directement associés aux Compagnies qui exploitent, de manière directe ou non, les ressources hydrocarbures au Sahara. De ces milieux, personne n'est autorisé à parler, même si certains dossiers sont connus de nombreux journalistes. Et surtout des patrons de presse. Ainsi, pour cette fois-ci, il semble que Amar Ghoul ait été jeté à la fosse aux lions. Qu'il se soit servi à la source, un peu comme tout le monde dans sa situation, cela ne fait aucun doute. Mais il reste un gagne-petit, par rapport aux grands prédateurs dont personne ne parle jamais. Il est à ces derniers ce qu'un moineau est à un grand requin blanc. Ce volatile mange beaucoup, par rapport à son propre poids, mais sans comparaison avec l’appétit des requins. Ghoul, comme les centaines de grands commis de l’Etat (quel grand mot !), a pris des pots-de-vin jusqu'à plus soif. Tout le monde le savait. Ces brusques révélations sur ses pratiques sont peut-être un simple coup de semonce, pour lui rappeler de ne pas aller trop loin, dans ses gesticulations politiciennes. A force de dire de son nouveau parti qu'il allait révolutionner la scène politique, et devenir le rassemblement de tous les Algériens qui aspirent à un changement radical, il a fini par y croire lui-même. Croire à des salades. Mais le premier cercle ne prend jamais de risques. Il lui a vraisemblablement envoyé un avertissement, une sommation sans frais, pour refréner ses ardeurs, et ne jamais oublier ce qu'il a été, ni l'argent qu'il a piqué. Je crois que cet article d'Algérie News se situe dans cet exact contexte. DB
|
Selon des révélations publiées par le journal Algérie News, dans ses deux versions en arabe en en français, M. Amar Ghoul, ministre des travaux publics, aurait perçu des pots-de-vin dans le cadre du contrat portant sur la réalisation de l’autoroute est-ouest. Le journal fait état d’une sorte de Hamas-connexion, ainsi que de plusieurs anciens ministres, impliqués dans le scandale. Le ministre des Travaux publics Amar Ghoul aurait touché des commissions liées au projet de l’autoroute Est-Ouest. Le quotidien national Algérie News a publié, mercredi 7 novembre 2012, les détails d’un document mettant en accusation ouvertement Amar Ghoul, le chanteur Cheb Khaled et d’autres responsables. Le journal précise que des noms de hauts fonctionnaires et de représentants de sociétés étrangères sont également cités, comme « acteurs d’un vaste système de commissions occultes, visant à favoriser certaines entreprises dans l’obtention de marchés du projet présidentiel qu’est l’autoroute Est-Ouest ». Evoquant « un mystérieux personnage » du nom de Pierre Falcon, le journal rapporte que cet intermédiaire, ressortissant d’origine française possédant différentes nationalités, a tenu une réunion en 2006 à la résidence Djenane El Mithaq, à Alger, avec MM. Abdelatif Benachenhou, alors ministres de finances, Chakib Khelil, ministre de l’Energie, et Amar Ghoul, ministre des Travaux publics. La rencontre s’est tenue à l’invitation du ministre des Affaires étrangères de l’époque, M. Mohamed Bejdaoui. Le but de la réunion était d’accorder « directement » aux chinois le projet de l’autoroute, contre 4,5 milliards de dollars en pétrole. Amar Ghoul, qui vient de quitter Hamas pour fonder un nouveau parti, TEDJ (Rassemblement, Espoir, Algérie), aurait informé alors le président Bouteflika de l’affaire pour gagner sa confiance. « Amar Ghoul se retrouve seul maître de l’autoroute Est-Ouest (…) La corruption a commencé avec le début de la tranche dite « Centre-ouest » du projet. Un personnage fait son entrée dans le dossier. Il s’agit de Chani Medjdoub, l’intermédiaire entre le groupement chinois et les responsables du ministère des Travaux publics. Son travail consistait à faire bénéficier les chinois de « largesses » administratives même aux dépens de la loi pour faciliter leur travail en Algérie. En contrepartie, il « graissait » la patte aux responsables qui lui ouvraient les portes. Il se faisait passer pour un ancien officier du renseignement avec de solides connaissances au plus haut niveau », selon le journal. 30 millions de dollars de commissions Parmi les contacts de M. Chani Medjdoub, figurait l’ancien secrétaire général du ministère des Travaux publics, qui aurait reçu des cadeaux de valeur. Le directeur général de la Résidence d’Etat du Club des Pins, M. Melzi aurait introduit l’intermédiaire, M. Medjdoub Chani, auprès d’un collaborateur de Amar Ghoul. En outre, M. Chani Medjdoub entretenait une relation sentimentale avec la fille du PDG du groupement chinois CITIC-CRCC. Relation qui lui aurait permis de signer un contrat de consultant auprès du groupe industriel à Pékin. « Sa mission : lever tout obstacle qui pourrait entraver le travail des chinois en Algérie sur le projet de l’autoroute Est-Ouest », rapporte El-Djazaïr News. D’après le quotidien, M. Chani Medjdoub a, dès la conclusion de l’affaire, convoqué une réunion à Pékin. « A l’ordre du jour, la création de sociétés fictives afin de faire transférer les pots-de-vin. Lors de cette réunion, Chani a touché la somme de 350.000 euros. Il retourne à Alger, et plus précisément auprès de son nouvel ami, le secrétaire général du ministère. Il ne revient pas les mains vides, il est porteur d’un cadeau. Dix millions de dinars. Il retourne en Chine pour rassurer ses amis (…) Il profite de l’occasion pour poser ses conditions. Il réclame 1,25 % du montant global de la partie Centre-Ouest à déposer sur le compte d’une société fictive créée pour l’occasion, la « Spirit of Eagle », une filiale d’une société dénommée SRHM, basée à Hong Kong, spécialisée dans la gestion des capitaux », rapporté Algérie-News, qui précise que M. Chani a créé d’autres sociétés fictives, comme ABM et Choviotte, pour y déposer l’argent des commissions. Des commissions estimées à 30 millions de dollars. Après avoir blanchi l’argent à travers des sociétés écran, les montants auraient été transférés vers d’autres comptes bancaires numérotés en Autriche et à Singapour. « Cela, sans compter les onze milliards de centimes perçus cash sur deux tranches », précise le journal. D’après Algérie-News, une partie de l’argent (800 millions de centimes) a été versée au chanteur Cheb Khaled, en contrepartie de deux concerts donnés à Sidi Yahia et à Riad El Feth. Une Hamas-connection Le journal cite également le nom de Abdou Sidahmed Tajeddine, « ami intime de Amar Ghoul », qui aurait servi d’intermédiaire pour l’entreprise canadienne SMI aux fins d’obtenir le marché d’étude et de suivi technique du projet « tranche Ouest » de l’autoroute pour le compte du groupement chinois CETIC. « Tadj Eddine s’est rendu en juillet 2008 à Paris pour y rencontrer au siège de la compagnie canadienne son PDG, Lezine Ben Arouche, un juif de nationalité canadienne. Taj Eddine négocie 8 % de commission sur le montant du contrat de onze millions de dollars. Un deal notifié dans un contrat établi par un bureau d’affaires spécialisé dont le siège se trouve en Suisse. Taj Eddine a reçu 2 % de sa commission, remis par le représentant de la Compagnie canadienne en Algérie, un certain Habib Merabet. 350.000 euros ont été transférés vers son compte bancaire HSBC à Genève. Si Chani Medjdoub était l’intermédiaire influent dans toutes les décisions concernant le « projet du siècle » en Algérie, Taj Eddine avait, lui, une grande influence sur le ministre lui-même », affirme Algérie News. M. Taj Eddine aurait ainsi présenté Ahmed Rafic Ghezali à M. Amar Ghoul en 2004.« Quelques temps après, il fut désigné à la tête de l’Agence de gestion des autoroutes. Ainsi, il était au fait de tous les détails des projets du ministère ». Le fils Bouguerra Soltani aurait, de son côté, aidé l’entreprise française « Igis » à obtenir un contrat de suivi technique de la tranche Est, puis de la tranche Ouest de l’autoroute, grâce à un autre intermédiaire, Hadj Kouider, « un homme de confiance » de M. Amar Ghoul . « Le ministre a donné ordre à Abdou Tadj Eddine Sid Ahmed d’aller à Paris au mois de Ramadhan (2008), la même année où l’entreprise française Igis avait obtenu son contrat. Il avait demandé à son « poulain » d’ordonner au directeur d’Igis de payer ce qu’il lui était dû (honoraires du ministre). Dans le cas contraire, le ministre allait expulser son entreprise d’Algérie. Le directeur d’Igis a annoncé à l’émissaire du ministre que ce qui revenait à Ghoul comme commissions a été payé à un certain Tayeb, une personne native de Chlef (…) Furieux, Taj Eddine ne savait pas que Amar Ghoul avait reçu son argent», indique Algérie-News. Source: Maghreb Emergent. |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire