Tizi Gheniff : Colloque sur «Nacef Slimane», 1er chahid de la wilaya III historique
A l’occasion de la commémoration du cinquantenaire de l’indépendance, la Fédération des fils de Chahid, en collaboration avec l’Organisation nationale des moudjahiddines de la daïra de Tizi-Gheniff, a organisé, la semaine dernière, le premier colloque sur le premier Chahid de la wilaya III au niveau de la salle omnisports du complexe sportif de proximité de la ville. Pour cette première commémoration du genre à travers la daïra de Tizi-Gheniff, outre les invités officiels et les autorités locales, avec à leur tête le chef de daïra, le nouveau P/APC et les responsables des différents corps de sécurité étaient présents, il y eut aussi l’importante délégation dépêchée par le wali de Tizi-Ouzou, composée de presque tous les responsables des différentes directions de la wilaya. Plusieurs familles de Chouhadas et d’anciens Moudjahiddine, à l’exemple de la veuve du Chahid colonel Ali Mellah dit « Si Chérif », commandant de la wilaya VI historique, étaient aussi présentes. L’ouverture s’est faite par l’hymne nationale, suivi de la prise de parole du directeur de wilaya des Moudjahiddine, représentant du wali, qui s’excusera de l’absence de ce dernier tout en transmettant son message à la famille du Chahid ainsi qu’aux participants, tout en promettant que l’an prochain, ce colloque se tiendra à Tizi-Ouzou, avec une préparation et des moyens appropriés pour sa réussite. S’en suivra alors une panoplie de témoignages sur le Chahid. L’intervention de M.Ait Ahmed Ouali « Si Ouali », connu dans cette partie de la wilaya par les plus anciens, d’autant plus qu’il était dans les années 1970 le chef de daïra de Draâ El Mizan, avec ses 14 communes, a été attentivement suivie. L’orateur, membre de la wilaya des moudjahiddines et néanmoins chargé de l’écriture de l’histoire, fera la genèse de la révolution armée et son évolution jusqu’aux évènements du 11 décembre 1960 puis aux accords d’Evian .Comme, il n’hésitera pas à répondre à certaines questions posées par l’assistance. Par ailleurs, Ali Nacef, l’un des cinq fils du Chahid, a projeté à l’assistance un intéressant documentaire sur la vie de son défunt père qu’il a lui-même réalisé.
Qui était Nacef Slimane ?
Le Chahid Slimane Nacef est né le 07 mai 1912 à Ivahrizène, relevant du douar M’Kira. Il est le fils de Nacef Mohamed et de Djemai Fatma. Sa famille finira, alors qu’il était très jeune, par s’établir au village « El Hara », situé à quatre kilomètres au Sud-Ouest de Tizi Gheniff. Issu d’une famille modeste, il aidera son père dans les travaux agricoles avant d’ouvrir un petit commerce au chef-lieu de la commune de Tizi Gheniff. Très éprouvé par les conditions de vie des algériens à cette époque, d’autant plus que le colonialisme ne faisait qu’appauvrir la population, alors qu’en face, les dominateurs se prélassaient et profitaient de la sueur des autochtones, il est acquis aux principes des premiers précurseurs de la lutte armée, d’autant plus que dans sa région, les militants étaient forts nombreux. D’ailleurs, ils formèrent une solide cellule, très disciplinée et surtout volontaire, pour affronter l’ennemi sous la bannière du PPA/MTLD. C’est donc naturellement à cette cellule, composée entre autres de Benradjedal Ali, Tazekrit Ahmed, Cheikh Mohamed, Nacef Mohamed …qu’échoit l’honneur de participer au déclenchement de la révolution en cette nuit fatidique du 1er novembre 1954.
Le départ sur M’Kira
Les premiers responsables du déclenchement de la révolution avait décidé de marquer cette date hautement symbolique par l’attaque du chef-lieu de la commune de plein exercice, sans faire de victimes, si ce n’est que de donner un avertissement à ces usurpateurs que le glas avait bel et bien sonné pour eux et qu’il était temps de déguerpir avant qu’il ne soit trop tard. Ainsi, pour cette nuit sacrée, les membres de cette cellule devaient rallier les autres militants du douar M’Kira, dans un cimetière situé à un demi kilomètre environ de Tighilt Bougueni, appelé « Thimedhline Ivahrizène », actuellement dénommé « Les quatre chemins » . Aussi, ce premier groupe de combattants devait parcourir au moins une douzaine de kilomètres par des chemins de montagne pour atteindre la destination à 23 heures, puis revenir aussitôt à Tizi Gheniff, soit faire une marche de vingt quatre kilomètres d’une traite.
Le regroupement à Thimdhline Ivahrizène
Quand le chef de mission, en l’occurrence feu Amar Merabet, s’était bien assuré de l’arrivée de tous les hommes désignés (20), car il était le seul à en connaître le nombre et les noms, il donna le signal de départ alors qu’une pluie fine commençait à tomber. Ce groupe disposait de 2 mitraillettes (MAT 49), 4 fusils de chasse, 4 pistolets, des couteaux et des haches.
Arrivée à Tizi-Gheniff
A son arrivée aux abords de Tizi Gheniff, Amar Merabet, le chef de cette section de fidaï, décida enfin à leur dévoiler leurs différentes missions ainsi que leurs objectifs et le scinda en quatre groupes. Aussi, Slimane Nacef et quelques uns de ses compagnons étaient désignés pour se rendre au siège de la caserne de gendarmerie, alors que Nacef Mohamed devait prendre position au niveau de l’ex boulevard, faisant face à l’ex école de filles baptisée, aujourd’hui, au nom du Novembriste « Cheikh Mohamed » et où une stèle a été érigée en cet emplacement. Benredjedal Ali et Heddar Akli sont désignés quant à eux au « foyer rural », ce cinéma qui a été ravagé par un incendie et qui se trouvait entre l’école des filles et l’école des garçons. A 0 heure 45, le baroud d’honneur est tiré et les colons ont commencé à s’affoler. La sirène se mit à retentir, ainsi que des cris d’affolement comme «Attention ! Attention ! Le village est encerclé ! » . Quinze minutes plus tard, tous les hommes se retrouvent à Lourika, le lieu prévu pour le ralliement, pour y passer le reste de la nuit, alors que d’autres avaient préféré rejoindre immédiatement leurs domiciles.
Les arrestations
Le jour même, les français se rendirent compte, d’après tous les rapports et les informations qui leur étaient parvenues à travers le territoire national, qu’il s’agissait bien d’une insurrection armée bien préparée et bien organisée ayant une vraie direction à sa tête. Nacef Slimane sera arrêté le 05 novembre 1954. Ils seront 23 militants, tous suspects, qui seront arrêtés par les gendarmes qui viendront les chercher chez eux, alors que les consignes données par l’organisation étaient de ne rien faire et de vaquer aux activités habituelles, en attendant de nouvelles instructions. Nacef Slimane aura à subir des sévices et des tortures indescriptibles, avant de rendre l’âme le 07 novembre 1954, laissant une veuve et cinq petits orphelins. Il sera, ainsi, le premier Chahid de la wilaya III historique. Il sera inhumé au cimetière jouxtant la caserne de la gendarmerie de Tizi Gheniff. En 1965, sa dépouille sera exhumée pour être ré-inhumée au carré des martyrs d’Adila. Le colloque prendra fin aux environs de 14h30, avec la remise de prix aux jeunes collégiens avant que tous les invités ne se rendent au niveau du collège « base5 » pour déjeuner.
« Nous avons eu la chance d’avoir connu et écouté les anciens camarades du Chahid Nacef Slimane avant leur disparition, et nous mesurons toute la portée de notre histoire, car comment on ne pourrait l’écrire en l’absence de témoins», nous ont déclaré des membres de l’association des activités de jeunes de M’Kira
« Nous avons eu la chance d’avoir connu et écouté les anciens camarades du Chahid Nacef Slimane avant leur disparition, et nous mesurons toute la portée de notre histoire, car comment on ne pourrait l’écrire en l’absence de témoins», nous ont déclaré des membres de l’association des activités de jeunes de M’Kira
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