jeudi 4 juin 2015

LE BILAN DU MAK SELON SON PRÉSIDENT: "APRÈS 14 ANS D’EXISTENCE, LE MAK A RÉCONCILIÉ LA KABYLIE AVEC ELLE-MÊME".

04/06/2015 - 12:22

KABYLIE (SIWEL) — Le président du Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK), Mas Bouaziz Ait-Chebib, a fait un bilan global du Mouvement depuis sa création à ce jour, affirmant d'emblée, et à juste titre, que le bilan du MAK est globalement positif. Il nous expose ici la genèse du Mouvement et les différentes étapes par lesquels il est passé jusqu'à la lutte pour l'autodétermination et la constitution d'un Etat kabyle. 

Nous publions ci-après le bilan global que Mas Bouaziz Ait-Chebib fait des 14 années d'existence du Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie. 


Le bilan du MAK selon son président: "Après 14 ans d’existence, le MAK a réconcilié la Kabylie avec  elle-même".
Au départ, la Kabylie avait considéré que tous les peuples amazighs devaient mener une lutte pan berbère, commune et globale, pour se libérer du colonialisme arabo-islamique avant de se rendre compte que les peuples amazighs d’Algérie et de Tamazgha étaient finalement dans une impasse historique en raison de cette vision erronée qui consistait à rechercher la reconnaissance officielle de la part d’entités étatiques néocoloniales qui partageaient toutes le même projet concernant l’identité amazighe : la programmation pure et simple de son extinction par une substitution linguistique et identitaire forcée et menée au pas de course. 

D'autre part, en raison de la diversité des territoires occupés par les amazighs qui ont induit des organisations sociales, des modes de pensée, des parcours et des rapports avec les Etats centraux différents, tous les peuples amazighs n’avaient pas la même vision du combat qu’il fallait mener. Et en Kabylie, absorbés et passionnés par cette lutte identitaire que nous menions, nous avons mis un temps fou à comprendre que les peuples amazighs pouvaient être différents, voire très différents et que nous devions construire une unité et une solidarité basées sur le respect de nos différences, une unité dans la pleine acceptation de nos diversités et non dans une uniformisation artificielle, d'avance vouée à l'échec. 

En dehors des Touaregs sub-sahariens qui n’ont jamais accepté les Etats-nations dans lesquels ils ont été emprisonnés, et qui ont vécu dans leur chair la programmation de leur extinction, les peuples amazighs n’avaient pas réalisé la gravité de leur situation au lendemain des indépendances. Et la plupart d’entre eux, à commencer par nous (les kabyles), se sont embourbés dans des luttes démocratiques à l'échelle nationale, contre-productives, dans lesquelles non seulement nous n’avancions pas dans notre amazighité mais que nous reculions à pas de géants en nous arabisant dramatiquement. 

De 1963 à 2001, bien que le cheminement ait été nécessaire à cette prise de conscience, nous n'avons pas cessé de nous épuiser à vouloir démocratiser l'Algérie et nous nous sommes longtemps fourvoyés. En 2001, c’est la fondation-même du MAK qui a été une véritable révolution. En effet, avec le printemps noir de Kabylie, nous avions brutalement compris que mener un combat identitaire global en Algérie relevait du suicide. La création du MAK a redéfini le combat identitaire porté par la Kabylie pour le sortir de la chimère algérianiste et nous avons enfin compris que cet algérianisme est le cercueil de la Kabylie . 

Aujourd’hui, comme la Kabylie après 1963, 1980 et 2001, et après une énième agression raciste, les mozabites comprennent eux aussi que depuis l’indépendance, c’est leur disparition et non pas leur intégration qui est au programme de l’Algérie officielle. Et c’est le plus naturellement du monde que les mozabites n’ont trouvé de soutien, structuré et pleinement assumé, nulle part ailleurs qu’en Kabylie. Et si le MAK n’avait pas ouvert la voie et n’avait pas persisté dans sa démarche malgré les insultes, la diabolisation, l’intimidation et la répression, les mozabites n’auraient trouvé aucun autre soutien en Algérie, même pas chez les partis dits "d’essence berbère" car aucun d'entres eux n’est monté au créneau pour dénoncer le racisme primaire de l’Etat algérien. 

D’autre part, en dehors de l’Algérie, après des débuts difficiles en raison des incompréhensions liées au combat tourné vers l’affranchissement de la Kabylie, le MAK a introduit et redéfini la dialectique du combat identitaire qu’il partage de plus en plus avec les autres peuples amazighs dans toute le Nord de l’Afrique. Les bouleversements géopolitiques qui attendent les territoires amazighs apporteront une reconfiguration de la région qui permettra l’émancipation des peuples amazighs vis-à-vis des Etats arabo-islamiques, et ce en dépit du discours sclérosé de certains acteurs des scènes publiques, collant parfaitement aux fameuses constantes dites nationales (basées sur la négation de notre existence) et artificiellement entretenues par les lobbys financiers et idéologiques du Moyen-Orient, notamment à travers les Etats nord-africains auxquels s'identifient ces acteurs. 

Nous avons la certitude que la dynamique engagée par notre Mouvement est la clé de l’avenir, non seulement pour la Kabylie et les peuples d’Algérie mais aussi pour les autres peuples Amazighs d’Afrique du Nord. Il ne reste qu’à faire sauter les derniers verrous psychologiques de l’aliénation dont quasiment plus personne n’est dupe. 

Evidemment, ceux qui ont le plus de mal à franchir le pas sont ceux qui tirent des dividendes de la politique participationniste avec les Etats illégitimes d’Algérie, du Maroc, de Libye, du Mali et du Niger. La Kabylie a porté la lutte contre le colonialisme français à bout de bras. Après 1962, la Kabylie a porté contre vent et marré le combat de la démocratie, de la justice, de l’égalité pour tous. L’Etat lui a préféré l’arabo-islamisme, négateur et liberticide. Aujourd’hui, la Kabylie porte encore une fois la seule voie de salut pour la paix, le bonheur et la sérénité. Les régimes algériens qui se succèdent depuis 1962 se trompent lourdement s’ils pensent pouvoir louvoyer encore longtemps car leur colonialisme est devenu une évidence. 

Le MAK est présent sur la totalité du territoire kabyle. Grâce à l'engagement de ses militants, il est arrivé à s'implanter partout en Kabylie sans moyens, sans support médiatique, et mieux encore en dépit de son interdiction, des campagnes hystériques de diabolisation et du black-out médiatique. Cette adhésion populaire, le MAK l’a gagné de haute lutte contre une multitude de forces hostiles, bien organisées et pourvue de moyens colossaux, mais comme on ne cesse de le répéter, « win iteddun ɣef tidet yessawad ». Nous sommes plus que jamais convaincus de notre victoire prochaine. 

Aujourd’hui, le MAK ,qui est le seul mouvement à être diabolisé et réprimée, est la seule et unique organisation politique qui réussit 3 grandes marches simultanées pour le 20 avril….nous défions quiconque d’en faire autant, en dehors de venir se greffer à nos appels bien entendu. Le MAK a démontré sa force à travers une présence permanente sur le terrain, comme en témoigne les dizaines de marches, de rassemblement, de conférence qu'il organise chaque année. 
De l'avis de tous, y compris de nos plus acharnés adversaires, aucune organisation ne mobilise comme le MAK. C'est le MAK qui a réhabilité Yennayer en l'imposant, de fait, comme un jour férié et en l’érigeant comme journée d'action à travers des marches populaires. Nous avons réussi tout cela grâce à la force conviction de nos militants. Nous n’avons que faire des locaux et des subventions d’un Etat raciste qui programme notre disparition. Nous avons la plus grande des richesses: la confiance du peuple kabyle. La clarté et la franchise du discours du MAK est en phase avec les aspirations réelles du peuple kabyle. 

Le MAK dit tout haut ce que les kabyles pensent tout bas. Le MAK a un discours de vérité qui ne trompe pas. Nous ne sommes pas embourbés dans des considérations politiciennes de compositions électorales et au fond d'eux-mêmes, même nos kabyles algérianistes savent que nous sommes dans le vrai. Il ne leur reste qu'un pas à franchir pour rejoindre la seule lutte qui vaille la peine d'être menée: Celle de l'affranchissement de la Kabylie de cette tutelle mortelle qu'est l'Etat algérien. La mobilisation de la Kabylie le 20 avril 2015 a été exceptionnelle et a confirmé l’adhésion du peuple kabyle à la démarche libératrice du MAK qui s’impose de fait, et aux yeux de tous, comme la force politique kabyle qui défend les intérêts moraux et matériels de la Kabylie. 

Grace au MAK, le peuple kabyle va aujourd'hui dans le sens de sa vraie libération. La Kabylie s’est enfin dotée d'un drapeau officiel dont les couleurs et la symbolique la représente réellement et ne la rattache pas de force, contre sa volonté, au monde arabe. L’accueil réservé à l’Annay Aqvayli (drapeau kabyle) a dépassé toutes les attentes. C’est un plébiscite de l’emblème national kabyle auquel le monde a assisté. Le drapeau kabyle est magistralement consacré par son peuple. 

La Kabylie s'est dotée d'un hymne qui parle enfin d'elle dans sa langue et dans lequel elle ne peut que se reconnaitre, contrairement à l'hymne algérien crée et imposé pour nous dissoudre dans ce monde arabe. La Kabylie s'est dotée d'une carte d’identité kabyle qui représente le citoyen kabyle dans sa langue et dans son identité réelle et non pas pour faire du citoyen kabyle un eternel "conquis". 

La Kabylie s'est dotée d’un Gouvernement Provisoire Kabyle (l’Anavad) qui porte la voix du peuple kabyle sur le plan international et qui défend le pays kabyle et non une petite province d'un vaste et chimérique monde arabe où la Kabylie est ballotée de ligue du monde arabe à la ligue du monde islamique! Non la Kabylie est un pays, une nation et un peuple qui a sa propre culture, sa propre civilisation et sa propre histoire qui plonge ses racines dans des millénaires d'existence sur le continent africain, dans cette vaste Tamazgha mainte fois conquise mais jamais soumise. Sur le plan diplomatique, le MAK a effectivement doté la Kabylie de son premier gouvernement dans son histoire. Cet avènement constitue le premier jalon dans l’édification de l’Etat kabyle, unique voie de salut pour la Kabylie et son peuple. 

L’Anavad n’est pas un gouvernement d'apparat et de pouvoir, c’est un gouvernement de combat pour imposer l’existence du peuple kabyle en dépit des hostilités et en dépit des intérêts géostratégiques des prédateurs internationaux. Sa vocation est d’internationaliser la question kabyle afin d’arracher la reconnaissance du droit du peuple kabyle à disposer de lui-même, conformément aux principes internationaux de l'ONU qui se doit de respecter ses propres principes. C'est pour être en phase avec cette évolution historique du combat de la Kabylie que le deuxième congrès du MAK a adopté l’autodétermination comme objectif stratégique et donner ainsi au peuple kabyle la possibilité de choisir librement son avenir et son destin. 

En vrai, nous n’avons rien inventé car historiquement le peuple kabyle a toujours vécu sur le mode de l’autodétermination. La Kabylie n’a jamais été dépendante d’un pouvoir central. La Kabylie a perdu sa souveraineté avec le colonialisme français et c’est lui qui le premier a entrepris en de démolir la cohésion et l’organisation sociale de la Kabylie pour se prémunir des rébellions et des soulèvements, en particulier après 1871. Avant ça, aucune autorité étrangère n’avait jamais empiété sur l’organisation socio-politique de la Kabylie qui est une organisation horizontale et non pyramidale. L’Etat raciste algérien a pris le relais du colonialisme français. Contrairement à la propagande négationniste qui voudrait priver le peuple kabyle d’avoir voix au chapitre, le MAK ne fait que se conformer à la tradition de la collégialité dans les prises de décision importantes pour la société d’où l’option du cadre référendaire d’autodétermination sous garantie internationale...étant donné la nature du régime algérien fraudeur et falsificateur de tous les accords politiques qu’il a eu à conclure aussi bien avec l’opposition en Algérie qu’en dehors des frontières qu’il a hérité de la France, comme en témoigne les divers accords entre les Touaregs et les régimes fantoches du Mali. 
Je tiens à saluer l’action du GPK qui a su faire connaître la Kabylie, ses valeurs ancestrales, d’obédience universelle, et ses aspirations de liberté dans le monde. A cet effet, j’exprime ma fierté personnelle et celle du MAK de voir la fondation internationale « GUSI » attribuer le prix de la paix pour l’année 2013 au président de l’Anavad, Ferhat Mehenni. Un prix bien mérité au vu de son parcours et surtout de sa détermination à défendre le droit du peuple kabyle à vivre en paix dans le monde. 

Ce n'est pas sans fierté que nous notons que notre projet a dépassé les limites de la Kabylie pour être partagé par d’autres peuples amazighs qui aspirent eux aussi maintenant à prendre en main leurs destins respectif, à l’instar des rifains, des amazighs de Libye et du Mzab. Quant aux Touaregs de l’Azawad, qui sont depuis plus de 50 ans en lutte pour leur existence, ils ont pu compter, de notre part, sur un soutien qui ne souffre aucune ambiguïté. L’Histoire nous a donné raison car, après avoir été condamné par les prétendus pan-berbéristes qui n'ont cessé de nous critiquer, voire de nous condamner, il s’est avéré que le MAK est la seule organisation politique qui apporte son soutien de façon concrète et indéfectible aux peuples amazighs victimes du néocolonialisme des régimes nord africains et sub-sahariens 
Sur un plan de politique plus générale, le MAK est incontestablement à l’avant-garde des causes justes et universelles, comme celle des libertés de culte et de consciences. Son soutien et son engagement en faveur des non jeûneur témoigne de sa fidélité, réelle et concrète, aux principes universels des droits humains. Le rassemblement historique du 03 août 2013 prouve une fois de plus le courage du MAK à briser les tabous et à faire reculer la peur devant l’inquisition organisée par le pouvoir algérien en collaboration avec les salafistes, pendant que tous ceux qui se positionnent en donneurs de leçons se murent dans un silence qu'ils ne savent briser que pour venir nous condamner. 
Loin de faire dans l’autosatisfaction, je ne voudrais pas donner cette impression mais, compte tenu des conditions dans lesquelles le MAK évolue, il faut reconnaître que notre bilan est résolument positif, même si ce bilan ne sera à la hauteur de nos attentes que le jour où le peuple kabyle aura arraché son droit à l'autodétermination et aura accédé à son propre Etat. C’est ce qui nous motive et nous oblige à redoubler d’efforts face au racisme et au totalitarisme de l’Etat algérien, il y a nécessité de sortir du huit clos algérien pour porter la question kabyle au niveau international. Car si l'autonomie que nous prônions dans un premier temps a permis la ré-émergence du nationalisme kabyle, elle est néanmoins considérée comme une affaire interne aux Etats. Par conséquent, la revendication d’autonomie ne relève pas du droit international. La seule manière d’impliquer les instances et la communauté internationales c’est de se conformer aux textes des Nations unies, et par la même occasion confronter ces mêmes instances à ses propres lois. L’autodétermination est la colonne vertébrale des traités, des conventions et des chartes de l’ONU relatifs aux droits des peuples. 
L’autodétermination à un autre avantage par rapport à la situation kabyle, que ce soit au sein du MAK ou dans la mouvance kabyliste de manière plus générale, elle a l'avantage, non négligeable de n'exclure ni l’autonomie ni l’indépendance qui restent des options parmi d’autres. Ces deux options, majoritaires chez les militants kabyles, se complètent et convergent toutes les deux vers l’avènement d’un Etat Kabyle. Alors, au lieu qu’il y ait confrontation entre les deux visions, il était vital de les rassembler autour d’un objectif commun à savoir l’autodétermination de la Kabylie. Et au final c’est le peuple kabyle qui décidera par lui-même, et par voie référendaire, du mode de gouvernance qui lui convient le mieux. Il ne peut y avoir plus démocratique et plus respectueux de la volonté du peuple kabyle, avec en prime la garantie du droit international, du moins dans ses principes juridiques. Avec cette démarche, nous somme dans le libre choix, la démocratie et le droit international. Une voie royale...les partisans de l'indépendance, de l’autonomie ou du statut particulier ne peuvent que se retrouver dans la lutte pour l'autodétermination de la Kabylie défendue par le MAK. Personne ne peut dire que nous imposons quoi que ce soit puisque la décision finale, et souveraine, reviendra au peuple kabyle tout entier. 

Alors, étant donné que la Kabylie a besoin de tous ses enfants et qu'elle réclame leur rassemblement , il est temps d'être à la hauteur de ce que nous prônons. L’heure est au dialogue et à la concertation de tous les acteurs politiques kabyles qui luttent réellement et sincèrement et qui assument publiquement leur volonté de bâtir une Kabylie libre et unie. Œuvrons, toutes et tous, ensemble, pour l'avènement d’un Etat kabyle démocratique, social et laïque et que le choix final de la forme que prendra cet Etat Kabyle soit laissé au peuple kabyle. C’est ça la démocratie, le libre choix et le respect de la volonté du peuple kabyle: c'est lui donner le choix et la parole pour l'exprimer. 


Bouaziz Ait Chebib, Président du MAK 

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