lundi 22 octobre 2012

Louisette Ighilahriz : « Non à tout hommage officiel au général Bigeard »


Louisette Ighilahriz : « Non à tout hommage officiel au général Bigeard »

22/10/2012 - 13:49

PARIS SIWEL) — La résistante kabyle Louisette Ighilahriz, torturée par le Général Maurice Bigeard en 1957 durant la guerre d'Algérie, appelle avec d'autres personnalités le gouvernement socialiste français à ce qu'aucun hommage officiel ne soit rendu à ce tortionnaire des guerres d'Indochine et d'Algérie.


Louisette Ighilahriz et le Général Maurice Bigeard (PH/DR)
Louisette Ighilahriz et le Général Maurice Bigeard (PH/DR)
Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian compte inaugurer le 20 novembre prochain à Fréjus une stèle qui accueillera les cendres du général Bigeard, sur le site du Mémorial des Guerres en Indochine. 

Claude Bourdet, ancien résistant et déporté à Buchenwald, Claude pour lequel « c'est un tortionnaire qui sera ainsi officiellement honoré », écrivait dès novembre 1955 : « Le supplice de la baignoire, le gonflage à l’eau par l’anus, le courant électrique sur les muqueuses, les aisselles ou la colonne vertébrale, sont les procédés préférés, car bien appliqués ils ne laissent pas de traces visibles. Le supplice de la faim est également constant. Mais l’empalement sur une bouteille ou un bâton, les coups de poing, de pied, de nerf de bœuf ne sont pas non plus épargnés » 

En 1957, âgée alors de 21 ans, Louisette Ighilahriz était tombée, avec son commando, dans une embuscade tendue par les parachutistes du général Massu, elle est capturée et emmenée, grièvement blessée, au quartier général. Là, elle est torturée, sans relâche, trois mois durant. 

Louisette Ighilahriz relatait dans son témoignage publié par Le Monde en juin 2000 comment Massu, ou bien Bigeard, lorsqu'ils venaient la voir, l'insultaient et l'humiliaient avant d'ordonner de la torturer. « Massu était brutal, infect. Bigeard n’était pas mieux ». Elle avait souvent hurlé à Bigeard : « Vous n’êtes pas un homme si vous ne m’achevez pas ». Il lui répondait : « Pas encore, pas encore ! ». 
Elle ne doit sa survie qu'à un médecin militaire qui la découvre fin décembre 1957 et la fait transporter dans un hôpital où elle échappe à ses bourreaux. 

En dehors de Louisette Ighilahriz (Patriote kabyle, torturée à l’état-major de la 10ème division parachutiste durant la guerre d'Algérie), les autres signataires de cet appel (que nous publions intégralement ci-dessous), il y a Patrick Chamoiseau (Écrivain), Guy Fischer (Sénateur du Rhône), André Nouschi (Historien, professeur émérite à l’Université de Nice, ancien de la 1ère DFL), Salah Amokrane (Militant associatif), Rosa Moussaoui (Journaliste), et Alain Ruscio (Historien) : 

« Il y a deux ans, le ministre de la défense du précédent gouvernement, Gérard Longuet, venu des rangs de l’extrême droite, avait conçu l’idée de transférer les cendres du général Bigeard aux Invalides. Une pétition, signée par 10.000 citoyennes et citoyens, fut pour beaucoup dans l’échec de cette provocation. Or, voici que le nouveau ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, remet sur pied un hommage de même nature, ce 20 novembre, avec une variante : le transfert de ces cendres au Mémorial de Fréjus, dédié aux combattants d’Indochine. Notre pétition était intitulée « Non à un hommage officiel au général Bigeard » : il fallait entendre : « Non à TOUT hommage ». 

Aucun de nos arguments, en effet, n’est obsolète. 

On nous présente encore et toujours cet officier comme un héros des temps modernes, un modèle d’abnégation et de courage, au mépris de tous les témoignages, de toutes les études historiques sérieuses. En fait, Bigeard a été un acteur de premier plan des guerres coloniales, un « baroudeur » sans principes, utilisant des méthodes souvent ignobles. En Indochine et en Algérie, il a laissé aux peuples, aux patriotes qu’il a combattus, aux prisonniers qu’il a « interrogés », de douloureux souvenirs. Aujourd’hui encore, dans bien des familles vietnamiennes et algériennes, qui pleurent toujours leurs morts, ou dont certains membres portent encore dans leur chair les plaies du passé, le nom de Bigeard sonne comme synonyme des pratiques les plus détestables de l’armée française. 

Qu’un gouvernement élu par le « peuple de gauche » persiste dans ce projet laisse à penser que l’intervention citoyenne est plus que jamais nécessaire. Nous n’abandonnerons pas, en ce qui nous concerne, ce combat. 

Non, décidément, NON, cent fois NON, à TOUT hommage au général Bigeard. » 



wbw 
SIWEL 221349 OCT 12

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